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25/03/2011 | FRANCE | N°2010-110

France | France, Conseil constitutionnel, 25 mars 2011, 2010-110


Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 décembre 2010 par le Conseil d'État (décision n° 343682 du 30 décembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jean-Pierre B. portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constituti

onnel ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le règlement du ...

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 décembre 2010 par le Conseil d'État (décision n° 343682 du 30 décembre 2010), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jean-Pierre B. portant sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 25 janvier 2011 ;

Vu les observations produites par le requérant enregistrées le 30 janvier 2011 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu lors de l'audience publique du 8 mars 2011 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles : « La commission départementale est présidée par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu ou le magistrat désigné par lui pour le remplacer. Elle comprend, en outre :
« - trois conseillers généraux élus par le conseil général ;
« - trois fonctionnaires de l'État en activité ou à la retraite, désignés par le représentant de l'État dans le département.
« En cas d'égal partage des voix, le président a voix prépondérante.
« Un commissaire du Gouvernement désigné par le préfet prononce ses conclusions sur les affaires que lui confie le président. Il n'a pas voix délibérative.
« Les fonctions de rapporteur sont assurées par le secrétaire de la commission. Il peut lui être adjoint un ou plusieurs rapporteurs. Le secrétaire et les rapporteurs sont nommés par le président de la commission parmi les personnes figurant sur une liste établie conjointement par le président du conseil général et le préfet. Ils ont voix délibérative sur les affaires qu'ils rapportent.
« Le secrétaire, les rapporteurs et les commissaires du Gouvernement sont choisis parmi les fonctionnaires ou magistrats en activité ou à la retraite » ;

2. Considérant que, selon le requérant, ces dispositions méconnaissent la séparation des pouvoirs et la garantie des droits des justiciables ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; que les principes d'indépendance et d'impartialité sont indissociables de l'exercice de fonctions juridictionnelles ;

4. Considérant que les commissions départementales d'aide sociale sont des juridictions administratives du premier degré, compétentes pour examiner les recours formés, en matière d'aide sociale, contre les décisions du président du conseil général ou du préfet ; que les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles prévoient que siègent dans cette juridiction trois conseillers généraux élus par le conseil général et trois fonctionnaires de l'État en activité ou à la retraite, désignés par le représentant de l'État dans le département ;

5. Considérant, d'une part, que ni l'article L. 134-6 ni aucune autre disposition législative applicable à la commission départementale d'aide sociale n'institue les garanties appropriées permettant de satisfaire au principe d'indépendance des fonctionnaires siégeant dans cette juridiction ; que ne sont pas davantage instituées les garanties d'impartialité faisant obstacle à ce que des fonctionnaires puissent siéger lorsque cette juridiction connaît de questions relevant des services à l'activité desquels ils ont participé ;

6. Considérant, d'autre part, que méconnaît également le principe d'impartialité la participation de membres de l'assemblée délibérante du département lorsque ce dernier est partie à l'instance ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles sont contraires à la Constitution ; que, par voie de conséquence, la dernière phrase du premier alinéa doit également être déclarée contraire à la Constitution ;

8. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ;

9. Considérant, d'une part, que la déclaration d'inconstitutionnalité des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'à compter de cette date et sans préjudice de modifications ultérieures de cet article, les commissions départementales d'aide sociale siégeront dans la composition résultant de la présente déclaration d'inconstitutionnalité ; que, d'autre part, il y a lieu, en l'espèce, de prévoir que les décisions rendues antérieurement par ces commissions ne peuvent être remises en cause sur le fondement de cette inconstitutionnalité que si une partie l'a invoquée à l'encontre d'une décision n'ayant pas acquis un caractère définitif au jour de la publication de la présente décision;

10. Considérant que le surplus de la disposition contestée n'est contraire à aucun droit ou liberté que la Constitution garantit

DÉCIDE :

Article 1er.- Sont contraires à la Constitution les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que, par voie de conséquence, les mots : « Elle comprend en outre : » à la fin du premier alinéa de cet article.

Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 9.

Article 3.- Le surplus de l'article L. 134-6 du même code est conforme à la Constitution.

Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 24 mars 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 25 mars 2011.


Synthèse
Numéro de décision : 2010-110
Date de la décision : 25/03/2011
M. Jean-Pierre B. [Composition de la commission départementale d'aide sociale]
Sens de l'arrêt : Non conformité partielle
Type d'affaire : Question prioritaire de constitutionnalité

Références :

QPC du 25 mars 2011 sur le site internet du Conseil constitutionnel
QPC du 25 mars 2011 sur le site internet Légifrance

Texte attaqué : Disposition législative (type)


Publications
Proposition de citation : Cons. Const., décision n°2010-110 QPC du 25 mars 2011
Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CC:2011:2010.110.QPC
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